Au Cameroun comme partout ailleurs, les systèmes alimentaires locaux se détériorent, mettant ces dernières en danger. La biodiversité alimentaire, la résilience aux conditions climatiques défavorables, les traditions alimentaires coutumières, et la relation spirituelle avec la nature sont menacées sous l’effet de l’intensification de l’agriculture, l’utilisation excessive d’intrants de synthèse, et l’adoption des habitudes alimentaires étrangères sous l’effet de la mondialisation, entre autres défis. Ces changements engendrent l’insécurité alimentaire et nutritionnelle ; de carences en micronutriments et d’obésité ; de vulnérabilité des systèmes alimentaires locaux ; ainsi que des systèmes alimentaires inéquitables et dépendants du marché dans lesquels les connaissances alimentaires traditionnelles sont peu valorisées.
L’heure est donc venue de se tourner vers une myriade d’espèces qui, de par le triangle du territoire national, peuvent être une source de nourriture. Il s’agit de ce que l’on appelle les « espèces négligées ou sous-utilisées » (NUS) dont la contribution aux systèmes alimentaires durables est fortement sous-évaluée en raison d’un manque général de connaissances et d’informations. Elles sont adaptées aux conditions locales et nécessitent moins d’intrants externes et économiques que les cultures de base. Nombre d’entre elles se développent dans des zones isolées, sur des sols arides ou des terres considérées comme impropres à d’autres usages. Elles constituent de ce fait un élément important des stratégies d’adaptation aux changements climatiques et sont économiquement viables pour les petits producteurs. En outre, de nombreuses espèces négligées ou sous-utilisées recèlent une haute valeur nutritive et sont riches en micronutriments et en composés bioactifs (IFAD, 2021). Elles font partie intégrante du patrimoine culturel des communautés et sont largement insérées dans les régimes alimentaires traditionnels. L’essor de certaines NUS sur les marchés, que ce soit au niveau local, national ou régional, montre qu’elles peuvent générer des revenus pour les communautés locales qui disposent des connaissances nécessaires pour les cultiver, les utiliser et les transformer. Toutefois ces espèces sont menacées et avec elles les savoirs locaux qui les accompagnent ainsi que la culture et les compétences des gardiens de ces aliments. Il est alors temps de veiller à ce que ces savoirs soient documentés, préservés et transmis aux générations futures afin de sauvegardé l’agrobiodiversité.